La fin du papier : Dans le meilleur des mondes du contrôle des pêches, toutes les déclarations de capture doivent être électroniques
Il s'agit d'une opportunité à saisir à bras-le-corps : les vieux chiens de mer doivent apprendre de nouveaux tours !
Bruxelles, 20 février 2019
Brian O'Riordan
Le règlement européen sur le contrôle des pêches est en cours de révision. Plusieurs rapports récents, notamment de la Cour des comptes européenne, ont attiré l'attention sur l'inadéquation des contrôles des pêches en place pour répondre aux besoins de la PCP. Une proposition de la Commission européenne visant à modifier le règlement de contrôle est actuellement examinée par le Parlement européen et le Conseil des ministres. Cependant, les roues tournent lentement en Europe, et il y a un certain nombre d'obstacles à surmonter. forte probabilité de retards dus aux élections parlementaires européennes en mai et au renouvellement du collège des commissaires européens en septembre.
Il est donc probable qu'il y ait un nouveau Parlement, un nouveau commissaire à la pêche et un remaniement des postes à la DG Mare avant que le dossier n'avance beaucoup. Quoi qu'il en soit, le secteur de la pêche peut s'attendre à ce qu'un nouveau règlement soit adopté au début de 2021. Il est prévu qu'elle soit appliquée deux ans après la date de son entrée en vigueur, ce qui nous mènera jusqu'en 2023.
Le secteur dispose donc d'environ cinq ans pour se préparer à la révolution envisagée en matière de suivi des navires et de déclaration des captures. Selon la DG Mare, cette révolution devrait entraîner la fin du papier. L'un des principaux problèmes de la déclaration sur papier est l'énorme quantité de travail qu'elle génère pour les autorités de contrôle.
La révolution électronique dans la déclaration des captures touchera particulièrement la flotte des navires de moins de 12 mètres (SSF). La proposition de la CE précise que "tous les navires, y compris ceux de moins de 12 mètres de long, doivent être équipés d'un système de suivi", et que "tous les navires de pêche de moins de 12 m doivent déclarer leurs captures par voie électronique". La proposition souligne que "pour les navires de 12 mètres de long, il est désormais possible d'utiliser des appareils mobiles, moins coûteux et faciles à utiliser.", et que "toute charge supplémentaire pour les petits opérateurs (pêcheurs artisanaux) sera évitée par l'introduction de systèmes de communication des données sur la pêche faciles et rentables, tirant parti des technologies de téléphonie mobile abordables et largement disponibles."
Alors que la flotte aux engins dormants de moins de 12 mètres représente plus de 80% de la flotte en nombre, emploie plus de 50% de la main-d'œuvre et peut représenter jusqu'à 50% de l'effort de pêche en termes de jours en mer, la flotte SSF ne contribue qu'à 6% en poids et 12% en valeur du total des captures de l'UE. Dans certains pays, par exemple aux Pays-Bas, elle ne représente que 1% des débarquements nationaux. En fonction du tonnage brut (8% de la flotte totale), de la consommation de carburant (6%) et de la puissance du moteur (32%), Dans l'ensemble, la flotte SSF présente un impact nettement inférieur à celui de la flotte à plus grande échelle.
On peut donc se demander pourquoi on insiste tant sur le contrôle électronique et la déclaration des captures dans la flotte artisanale. Utilise-t-on un marteau de forgeron pour casser une noix ?
Bien que cette question soit pertinente, les technologies numériques permettent aux SSF d'exploiter leurs entreprises plus efficacement, de planifier leurs sorties de pêche de manière plus stratégique, de commercialiser leurs prises plus efficacement et de s'engager de manière plus significative dans la gestion des pêches. En bref, la technologie numérique offre une énorme opportunité pour la flotte artisanale, et LIFE encourage la SSF à la saisir à deux mains.
Début décembre, en coopération avec les États membres, la DG Mare a organisé un atelier sur les outils numériques pour la pêche à petite échelle afin d'examiner de plus près les initiatives actuelles en matière de surveillance électronique et de déclaration des captures. Les trois sessions ont porté sur la surveillance électronique, les outils numériques pour la déclaration des captures, et l'utilisation de l'EMFF comme mécanisme de financement de l'UE. La proposition de la CE pour un nouveau FFEM après 2020, qui est actuellement soumise au Parlement européen et au Conseil, souligne que "...certaines obligations prévues par la révision du règlement de contrôle justifient un soutien spécifique de la part de l'EMFF".dont "les systèmes obligatoires de suivi des navires et de notification électronique dans le cas des navires de petite pêche côtière, et les systèmes obligatoires de surveillance électronique à distance."
Un rapport complet de la réunion est disponible sur le site web de la DG Mare (https://ec.europa.eu/newsroom/mare/document.cfm?action=display&doc_id=57359), ainsi que les présentations faites lors de l'atelier (https://ec.europa.eu/fisheries/press/outcomes-workshop-digital-tools-small-scale-fisheries-brussels-4-5-december-2018_en).
Les 16 présentations faites lors de l'atelier et les discussions qui ont suivi ont mis en évidence le fait que le Brave New World de la déclaration des captures n'attend pas seulement dans les coulisses mais existe depuis plusieurs années. Les solutions technologiques, notamment la reconnaissance vocale, l'intelligence artificielle, l'apprentissage automatique et les drones (sous-marins et aériens), existent déjà et sont déjà utilisées dans le domaine de la pêche en mer.
Cela dit, quelle que soit l'efficacité et la facilité d'utilisation des nouvelles technologies mobiles, s'il n'existe pas d'interface de programmation d'applications (API) efficace entre la technologie mobile et le serveur enregistrant les données de capture, ainsi que l'infrastructure nécessaire pour traiter les flux de données en premier lieu, le nouveau règlement de contrôle sera davantage un obstacle qu'une feuille de route pour une gestion efficace et efficiente de la pêche en Europe. À cet égard, les questions interconnectées de la protection des données et de la vie privée sont une source de préoccupation, notamment en ce qui concerne les images de vidéosurveillance. La vidéosurveillance est un élément majeur du nouveau règlement de contrôle, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre de l'obligation d'atterrissage.
Plusieurs des présentations ont souligné que les systèmes automatisés de surveillance des navires, en particulier lorsqu'ils utilisent des engins actifs, sont capables de fournir des informations sur l'activité des navires. En fournissant, comme ils le font, des données sur la position, la vitesse et la direction d'un navire particulier, les changements enregistrés dans la vitesse et la direction peuvent indiquer quand l'engin est posé, remorqué et récupéré. Ces données peuvent ensuite être recoupées avec les informations du journal de bord afin de vérifier l'exactitude des données fournies sur les heures de pose et de récupération des engins, ainsi que sur la localisation des lieux de pêche.
Les questions de sécurité maritime ont fait l'objet de nombreuses discussions, et plusieurs participants ont attiré l'attention sur le fait que le danger inhérent à l'exécution de tâches multiples sur de petits navires dans des conditions de mer défavorables, avec des courants et des marées traîtres. Des voix se sont élevées pour demander que la déclaration des captures soit effectuée après l'entrée dans le port plutôt que de rendre obligatoire la déclaration des captures avant le débarquement.
L'âge croissant des pêcheurs artisanaux a également été évoqué comme un sujet de préoccupation. Dans plusieurs cas, il a été noté que les pêcheurs plus âgés avaient des difficultés à s'adapter aux technologies informatiques et numériques. Le renouvellement intergénérationnel est un problème particulier dans le domaine de la pêche, et le SSF ne fait pas exception. La question des erreurs dans la saisie des données, qui invalident les rapports de capture, est liée à ce problème. SPlusieurs praticiens ont attiré l'attention sur la nécessité d'une formation adéquate et d'un délai suffisant pour permettre aux pêcheurs d'apprendre à utiliser les systèmes numériques de déclaration des captures et de s'y habituer. Une formation inadéquate et un manque de familiarité avec les outils numériques entraîneraient un grand nombre d'erreurs qui invalideraient les données enregistrées.
Enfin, l'un des principaux messages à retenir de la réunion est que les données générées par la surveillance électronique et la déclaration des captures à des fins de contrôle pourraient également servir à de nombreuses autres fins. Par exemple, l'utilisation multiple des données du journal de bord et de la détermination de la position pourrait grandement aider les gestionnaires des pêches, les scientifiques et les pêcheurs eux-mêmes.
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Ressources :
Marteau de forgeron et écrou : https://lifeplatform.eu/control_regulation/
Rapport spécial n° 08/2017 de la Cour des comptes européenne : Contrôles de la pêche dans l'UE : des efforts supplémentaires sont nécessaires https://www.eca.europa.eu/en/Pages/DocItem.aspx?did=41459